Grèce, terre de mythologies

Le rêve d’une croisière sur la mer Égée, que ma compagne et moi partagions, s’est concrétisé au printemps 2006. J’avais choisi un circuit qui nous conduirait aussi sur le continent, dans quelques villes historiques de la Grèce antique, dont Delphes, que je tenais absolument à visiter. Nous avons quitté Montréal en début de soirée le 18 mai sur les ailes d’Olympic Airways et notre avion s’est posé à l’aéroport d’Athènes sous un radieux soleil matinal après quelque 8h.30 de vol. La cueillette de nos bagages et leur inévitable inspection complétées, nous sommes montés dans l’autocar qui nous attendait à la sortie de l’aérogare. Le chauffeur calme et souriant, avait pour mission de nous conduire à la découverte des principales attractions de la capitale.

Après un premier repas pris en terre grecque dans un restaurant imprégné de subtiles odeurs de la mer, dont les eaux caressées par le vent projetaient leur touche délicate sur les bords d’une plage endormie au soleil, nous nous sommes mis en route pour le Péloponnèse. Quelques kilomètres plus tard, nous avons assisté à une première présentation de plantations d’oliviers, ces arbres quasi indestructibles qui peuplent le pays tout entier. Ils forment un vivant et visible trait d’union entre les nombreuses îles et le continent. Ils s’offrent à notre regard, regroupés sous diverses formes vertes, qui refusent de céder le pas à la sécheresse ambiante. Des villages aux coquettes maisons blanches, portant fièrement le chapeau ocre, vêtent et coiffent entièrement certaines collines, tel un tricot, oeuvre d’un novice du jeu des aiguilles, dont les mailles sont parfois serrées, parfois plus relâchées,

La ville de Loutraki est sise sur le canal de Corinthe qui relie la mer Égée et la mer Ionienne, évitant ainsi aux bateaux un détour par le sud du Péloponnèse. En soirée, nous sommes allés sur la promenade longeant la mer à la recherche de ce restaurant que l’on nous avait recommandé et dont la cuisine fut à la hauteur de sa réputation. Ma compagne et moi avons profité de la touchante invitation de la nature qui, en ce premier soir vécu sur le sol grec, nous conviait à faire quelques pas sous l’éclairage des lampadaires, sachant bien que son charme nous porterait à oublier le temps. Les vagues qui venaient mourir sur la plage, léchaient en passant le flanc des bateaux accostés que nous côtoyions, et leur bruit feutré se mêlait harmonieusement au chant de la mer Égée qui, dans la douceur vespérale, nous parlait de ses mythologies.

Le Péloponnèse, porte de nombreux vestiges des forteresses d’anciennes cités érigées par différentes civilisations ou monarchies qui se sont avec le temps intégrés au paysage, où règnent en maîtres collines et vallons. Dans plusieurs cas, l’archéologie a prouvé que les légendes relatant les luttes entre différentes villes ou royaumes ont un fondement historique. Les pierres des fortifications qui subsistent encore portent cependant en elles une énergie guerrière dont j’ai personnellement trouvé le ressenti incommodant. Retournés à Athènes, c’est au Pirée que nous attendait l’Ocean Monarch, véritable hôtel flottant qui nous servirait de résidence pour plusieurs jours, tout en transportant ses clients d’une île à l’autre pendant les heures nocturnes.

Le premier joyau que la Mer Égée nous a présenté dans son écrin fut Mykonos, celle que l’on surnomme, l’île aux moulins blancs. Si vous voulez voir Mykonos, imaginez un océan bleu poussant de petites vagues blanches sur les côtes d’une île baignée de soleil. Ajoutez à cette image, des petits ports de pêche où se reposent des caïques de toutes les couleurs, des dômes d’églises bleus dressés parmi des maisons blanches de forme cubique, pendant qu’au sommet des collines, des moulins à vent tournent leurs ailes blanches. Chaque venelle de la ville est une peinture géante et tout coin de rue, une révélation. Sur la droite du port les maisons descendent en cascades vers la mer, des maisons blanches aux cadres de fenêtres multicolores qui contrastent avec le bleu aquatique. Il y a aussi contraste atmosphérique entre la chaude lumière du soleil et la fraîcheur marine. Le terrain rocheux qui s’élève de la mer prend la forme de collines et de vallées

On nous avait parlé des mascottes insulaires, trois pélicans roses, très attachés à leur terre natale. Nous les avons recherchés dans les ruelles bordées de charmantes petites maisons s’appuyant amicalement les unes contre les autres, comme pour éviter une chute fatale dans les fortes pentes dont le territoire de la ville est largement pourvu. Des compagnes de voyage nous avaient devancées pour la localisation des oiseaux. Elles ont vite fait de nous conduire à une «taverna», dont le terrain adjaçant est devenu le cadre de vie restreint de ces célébrités. Les plumes décolorées du doyen, qui semblait avoir atteint l’inévitable fin de sa route, ne parvenaient pas à dissimuler le tremblement continuel qui agitait son corps. Le calme revivait chez lui pendant que je lui transmettais de l’énergie, mais le tremblement reprenait dès que je retirais les mains. Le jeune adulte tout rose qui veillait à ses cotés se laissait toucher tout en sélectionnant les visiteurs pouvant se permettre de lisser ses plumes. Ma compagne l’a longuement caressé tout en lui parlant doucement et en guise de remerciement, il a délicatement refermé sur son bras, un long bec qu’il a doucement glissé sur une quinzaine de centimètres. Nous avons d’abord été surpris, puis charmés par ce geste. Une dame, témoin de ces faits a tenté d’imiter mon épouse, mais à peine eut-elle le temps de toucher l’oiseau, que le bec s’est durement refermé sur un poignet qui, dans un cri, fut vivement retiré de sa prison.

C’est en entendant des protestations de clients d’un restaurant voisin que nous avons découvert le troisième volatile. Nous avons aperçu un restaurateur, qui visiblement en avait l’habitude, chasser l’intrus qui – peut-être par égard pour les touristes - s’était chargé de vérifier la qualité de la nourriture servie sur la terrasse. Le remue-ménage causé par sa présence nous portait à penser que cette fois, il était allé plus loin que la simple inspection visuelle. Déçu d’être incompris, tête basse, il s’est réfugié dans une ruelle. Ces oiseaux trop sédentaires semblent ignorer la beauté de la campagne insulaire, parsemée de fleurs, de rochers sombres et de moulins blancs.

Pour se rendre à Éphèse, qui sous la domination des Romains devint la ville la plus peuplée de l’Asie Mineure, il nous faut accoster au port de Kusadasi en Turquie qui est la porte d’accès à l’une des plus importantes reconstructions archéologiques au monde. C’est à quelques kilomètres de là que fut redécouverte Éphèse, la célèbre cité ensevelie sous des mètres de sable qui l’ont partiellement protégée des outrages du temps. Certains des édifices construits ou restaurés par les Romains, sont en assez bon état pour que notre imagination puisse percevoir toute la beauté dont ces maisons de la culture ou sanctuaires étaient parés il y a deux millénaires

Fondée au dixième siècle avant notre ère par les Grecs, elle passa en 133 sous la domination des Romains. En 129, quand l’Asie Mineure devint province romaine, Éphèse comptait 200,000 habitants. En 88 avant notre ère les Éphésiens se révoltèrent contre Rome et ils massacrèrent tous ceux qui parlaient Latin en Asie Mineure. En représailles, le général Scylla brûla la ville.
Pendant la période Helléniste l’une des deux rues principales de la ville fut pavée de marbre, dans lequel les roues des chars ou autres véhicules hyppomobiles ont creusé des ornières. On croit encore entendre le bruit de pas des chevaux de Marc-Antoine qui faisait visiter à Cléopâtre cette partie de l’Empire Romain. La bibliothèque de Celsus construite en 117 par le consul Julius Aquila, était l’une des plus importantes après celles d’Alexandrie et de Pergame. Elle est remarquable par son architecture. La façade de ses deux étages est richement décorée. Dans des niches se dressent des statues représen-tant les vertus de la sagesse, de l’intelligence, du jugement et de la science. Construites contre le flanc sud de la montagne les maisons des habitants aisés étaient décorées de magnifiques fresques et de mosaïques. Elles possédaient des chambres luxueuses, des salles de bains et une cuisine. Le toit d’une maison servait de terrasse à la maison suivante construite dans la pente de la montagne.

Patmos

Patmos est une petite île de la mer Égée, dans la chaîne du Dodécanèse située au sud-ouest de la Turquie. Elle se distingue par ses maisons blanchies à la chaux ornées de couleurs vives, toile de fond idéale pour son chef-d’œuvre architectural, le fameux monastère qui abrite de magnifiques fresques et de rares manuscrits. On sait que les Romains utilisaient Patmos comme lieu de déportation. En 95 l’empereur Domitien y exila l’apôtre Jean, trouvé coupable d’avoir enseigné la parole de Dieu. En 1088, fut construit le célèbre monastère de Saint-Jean-l’Évangéliste sur la place du temple d’Arthémis. En 1138, les moines autorisèrent les insulaires à s’installer autour de son mur d’enceinte donnant ainsi naissance à la ville de Patmos. La grotte où l’Apôtre Jean a reçu la révélation de l’Apocalypse est très fréquentée par le tourisme religieux. Dans ces lieux, on a mis à la disposition des visiteurs quelques bancs, dont j’avais remarqué la facture particulière lors de visites dans les monastères orthodoxes. Ici, la méditation fait corps avec les vibrations dont est imprégnée le rocher. Les niches creusées dans les mûrs gardent, scellés sous verre, deux objets utilisés par Jean, soit: la planche qui lui servait de table pour écrire, et un coussin tenant lieu d’oreiller. C’était la première fois depuis mon arrivée dans ce pays que mon ressenti discernait une véritable énergie spirituelle. Dès son entrée dans cette célèbre grotte, l’apôtre Jean, accueille toute personne sensitive en la revêtant d’un agréable manteau vibratoire dont le souvenir persiste longtemps.

Rhodes

Cette terre, baignée par les chauds rayons apaisants d’Hélios, le dieu soleil, est située dans la mer Égée, à quelque18 kilomètres à l’ouest de la Turquie. Elle fait partie de la préfecture du Dodécanèse dont la principale ville, Rhodes, est la capitale. Cette cité antique qui, dans un enchevêtrement de rues est ponctuée de jardins de places, de fontaines et d’élégantes maisons aristocratiques, fut célèbre dans l’antiquité par le Colosse de Rhodes, l’une des Sept Merveilles du Monde, statue gigantesque autrefois située à l’entrée du port de la ville. Le folklore est ici, omniprésent. Les hommages au soleil sont naturels sur cette terre même si les monuments s’y rattachant sont moins visibles aujourd’hui. L’intérieur de l’île est montagneux et couvert d’une forêt de pins, de cyprès, et la population, qui en occupe surtout le contour, est clairsemée en son centre. Sa caractéristique la plus frappante est la Vallée des Papillons où ceux-ci se réunissent par dizaines de milliers à chaque été. Le mont Attavyros est le point culminant du territoire. Dans les côtes rocheuses se dissimulent de larges bandes de terres arables, où on cultive le citronnier, la vigne et une grande variété de légumes. La flore est celle qui couvre tout le territoire méditerranéen. L’économie de l’île est tournée vers le tourisme, sa principale source de revenus.

Crète

Dans cette contrée d’eaux cristallines, de plages immenses, de palais et de musées, dès le débarque-ment au port d’Héraclion, au premier coup d’œil, nous pouvons sentir l’influence des Vénitiens qui ont régné sur cette île pendant quatre siècles. Dans le port subsiste encore la forteresse de ces conquérants et quelques éléments de leur arsenal. Cette terre bercée par un climat méditerranéen est la plus grande des îles grecques et l’une des plus célèbres. Elle fut le centre de la civilisation minoenne, la plus ancienne d’Europe. Elle garde aussi la trace des différentes conquêtes dont elle fut victime au cours des millénaires.

Partir à la découverte de cette terre particulière, tant par sa géographie que par son identité, c’est aller vers des sensations que seule cette île peut vous procurer. La nature y est splendide, la mer d’un bleu azur et son climat est le plus ensoleillé des îles grecques. La Crète vous présente des paysages montagneux dont l’élévation forme de fertiles plateaux tracés de chemins sinueux conduisant à des villages aux maisons blanches baignées de soleil. Les visiteurs recherchant le calme, peuvent profiter de la quiétude d’une forêt en montagne ou d’une baie isolée. Les côtes qui couvrent 1600 kilomètres abritent de superbes gorges et des criques rocheuses, de charmants bourgs munis de petits ports où les touristes viennent écouter et apprendre le langage de la mer. Les amoureux de la solitude apprécieront les promenades sur des kilomètres de plages de sable et de galets bordées de falaises et de tamaris. C’est le paradis des randonneurs.

Santorin

Les couleurs de la terre de Théra, de ses paysages, de la mer jointes à la limpidité de l’horizon, créent un mystérieux ensemble où se mélangent émotions, éblouissements et interrogations. Le caractère volcanique gratifie la beauté du paysage d’une couleur caractéristique. C’est l’activité du volcan qui façonna Théra et lui attribua une forme bien particulière. Un tour de l’île s’impose pour les amants du soleil, de la nature, de la culture et du mystère. Cette île offre sans aucun doute l’un des spectacles les plus saisissants de la Méditerranée. Vous tomberez inévitablement sous le charme des maisons voûtées éblouissantes de blancheur, creusées dans la roche volcanique.

Le mot «unique», que l’on a exagérément mélangé à toutes les sauces, retrouve ici son sens premier. Rien n’est comparable à cette terre dont le relief tourmenté nous parle de son origine. Dès son approche, notre regard ébloui se porte sur une suite de maisons blanches perchées au bord du vide. Elles sont semées le long des hauteurs de l’île, sur des falaises de pierre noire plongeant dans la mer. Les bateaux jettent l’ancre au large de la principale ville, Fira, et des caïques vont cueillir les visiteurs pour les transporter sur la plage. De là, vous pouvez marcher sur le sable chaud ou escalader la falaise par le funiculaire. Si vous souhaitez profiter plus longtemps d’une vue sur le paysage, vous avez la possibilité de monter à dos d’âne ou encore à pied, par des escaliers et sentiers serpentant entre les arbres et les buissons.

Kalambaka

La traversée du pays du sud-est au nord-ouest nous offre un panorama contrastant avec celui des îles. Du côté ouest, le paysage se fait particulièrement verdoyant du fait qu’il réussit à maintenir une relation plus cordiale et plus constante avec la pluie. Les routes bordées de superbes bouquets de lauriers roses traversent des forêts d’oliviers, d’abricotiers et de pistachiers d’où l’on voit émerger ça et là le toit ocre d’une maison. Il arrive qu’au hasard de la route une courbe débouche sur un troupeau de chèvres dont les bergers canins semblent ignorer les dangers de la circulation.

La ville de Kalambaka est située au cœur d’un décor grandiose, au pied du massif des Météores, forêt de rochers qui reste toujours une énigme pour la géologie. Ici nous avons le sentiment de pénétrer dans un monde étrange devant ces énormes colonnes qui semblent écraser la ville tellement tout apparaît minuscule face à ces géants. Météores provient du Grec, meteoros, qui signifie, suspendu dans les airs. Comment mieux définir les monastères juchés au sommet de ces pitons rocheux. Au onzième siècle, de moines ermites commencèrent à en occuper les grottes creusées dans le roc. Au quatorzième siècle, pour se protéger des invasions, les moines commencèrent à construire ces incroyables couvents qu’ils érigèrent pierre sur pierre. Pour y accéder les visiteurs étaient hissés là-haut dans un panier suspendu à une longue corde. Il en était ainsi pour les provisions et tout ce qui était destiné à se rendre au sommet. Des escaliers ont maintenant été aménagés pour que nous, pauvres touristes, puissions accéder à certains d’entre eux.

En soirée, une promenade dans les rues de Kalambaka revêt un charme particulier. Les imposantes colonnes percent l’obscurité de la nuit et semblent veiller sur des rues bien éclairées où les boutiques achalandées ne ferment que tard. Nous nous sommes éloignés, ma compagne et moi, de ce va et vient pour marcher dans une nuit calme, douce et enveloppante. J’avais du mal à détacher les yeux de la splendeur magique empreinte de mystères du ciel étoilé, pendant que le silence remplissait tout l’espace et que la brise légère se faisait caressante. Une grande paix m’habitait, celle que dame nature étend sur ceux qui aiment vivre des moments de communion avec elle. Ces moments gardent pour moi un côté sacré empreint de douces émotions. Notre chambre d’hôtel était la bienvenue après cette journée mouvementée. Le matin suivant verrait notre départ vers un autre coin du pays.

Corfou

Corfou offre des paysages contrastés et une végétation luxuriante, elle est, et de loin, la plus verte des îles grecques. Sa côte orientale peu accidentée, est découpée de baies et compte quantité de plages au sable fin, alors que sa côte occidentale, plus abrupte et rocheuse, est creusée de ravissantes petites criques et de grottes qu’une excursion en bateau nous permet d’explorer. Le nord de l’île se fait plus montagneux alors qu’une plaine fertile occupe le centre où vignes, oliviers, orangers, citronniers, cyprès et platanes ont trouvé une terre propice à leur épanouissement. Sur ce sol ont été érigées plus de 800 églises et monastères dans un amalgame de différentes architectures dont les plus visibles sont byzantine et vénitienne.

Une excursion vers le sud vous conduira au petit village de Gastouri près duquel l’Impératrice Sissi fit construire son palais, l’Achileon. De ses magnifiques jardins plantés de différentes essences d’arbres et de fleurs, la vue sur la campagne est magnifique. Un petit port de mer aujourd’hui abandonné desservait autrefois le château. L’architecture et l’aménagement du palais s’inspire de la mythologie grecque dont la maîtresse des lieux s’était éprise

L’image de la ville de Corfou est le souvenir marquant de ceux qui visitent l’île. Fortifiée, elle est encerclée de châteaux construits par les Corfiotes de l’Antiquité et les Byzantins, puis, achevés par les nombreux envahisseurs. La vieille ville s’est développée entre deux forteresses entourées de remparts. Elle demeure quasiment intacte n’ayant pas subi de tremblements de terre. Son centre historique avec ses monuments vénitiens, ses placettes et ses ruelles tortueuses, possède toujours le charme d’une ville italienne.

Nous logions à l’hôtel Mon Repos, cette même maison où le gouverneur britannique a accueilli l’Impératrice Sissi. Sous la lumière du jour, nous pouvions observer les poissons qui s’amusaient à glisser paresseusement dans des eaux limpides, pendant qu’au-delà d’un bras de mer azur, se dessinaient les montagnes de l’Albanie. Au crépuscule, ma compagne et moi prenions grand plaisir à marcher sur une longue promenade bien pavée qui épouse les courbes de la côte. La brise douce, caressante, éveillait le poète en moi qui, en écoutant le fascinant dialogue entre la terre et la mer, se sentait privilégié de goûter à ce monde enveloppé de beauté et de mystères. Avant que ne s’allument les étoiles, un mince, mais brillant quartier sélène qui - en ces jours flottait presque sur le dos - laissait apparaître une pâle lune bien circulaire, semblant reposer sur son hamac. Je me disais intérieurement: Il n’est pas étonnant que cette terre soit un lieu de prédilection pour les romantiques, quand le soleil brille sur ses jours et que la lune est elle-même renversée devant l’éblouissant charme de ses nuits!

Delphes

C’est avec regret que nous avons quitté la terre des Corfiotes pour rejoindre l’autocar qui nous attendait à Igouménitsa. Nous sommes partis en direction sud, suivant une route sinueuse qui longe d’abord la côte. De magnifiques paysages se succédaient, nous présentant, selon les caprices des courbes du chemin, tantôt une mer habitée d’îlots, tantôt des montagnes, que la pluie, plus généreuse dans cette partie du pays, a habillées de végétation. Nous avons mis quelques heures pour atteindre Delphes, ville de l’Antiquité juchée sur un plateau dans le flanc du mont Parnasse et qui autrefois était considérée comme le centre du monde. Alors que nous nous engagions sur une route en lacet pour rejoindre notre hôtel, Héléni, notre compétente guide grecque, dit: «voici Delphes, que vous pouvez apercevoir dans les hauteurs. C’est là que nous logerons ce soir.» En jetant un regard sur la ville, j‘ai ressenti une forte hausse de mes vibrations qui ont continué à s’élever jusqu’à ce que nous arrivions à destination. En descendant de l’autocar, elle étaient tellement élevées, que j’avais la sensation d’être en état d’ébriété, sensation accompagnée du pressentiment que quelque chose d’important pour moi allait se produire.

Nous étions arrivés à Delphes en fin d’après-midi et, une fois les bagages déposés dans notre chambre d’hôtel, nous avions fait connaissance avec les lieux avoisinants. Pendant le repas du soir servi dans notre maison d’hébergement, je priais le vin grec d’abaisser mes vibrations afin de ne pas passer une nuit blanche et, généreusement il a répondu à mon appel. L’hôtel est construit dans une forte pente de la montagne, de sorte que, au niveau de la rue, nous y entrons par le haut et il nous est impossible d’imaginer le nombre d’étages qu’il comprend. L’ascenseur doit descendre plutôt que de monter pour nous conduire au sixième étage. Les fenêtres et un large balcon donnent sur une superbe vallée tapissée d’oliviers s’étendant jusqu’à l’horizon, où nous devinions la mer plus que nous la percevions, sous un splendide coucher de soleil dont nous gratifiait la fin de ce jour

Le lendemain, Apollon nous conviait à une visite de ce qui fut son domaine et l’un des plus envoûtants sites de la Grèce antique qui, en plus du sanctuaire de Delphes comprend nombre d’autres monuments dont la plupart avaient un caractère votif ou commémoratif. La topographie a dicté l’aménagement du site en trois étages (théâtre, temples et autres monuments) dont il est probable que les cataclysmes ont modifié l’image. La répartition des édifices demeure hétérogène sur les lieux, dont certaines parties sont intensément construites alors que d’autres restent presque vides.

C’est dans le sentier conduisant au troisième palier, près du théâtre, que de nouveau mes vibrations sont remontées en force et que j’ai eu la vision d’un homme abordant la quarantaine. Il était brun d’yeux, de teint et de cheveux qui, très abondants étaient bouclés et coupés courts. Il se distinguait de ses contemporains par sa physionomie. Je lui ai simplement demandé: «fais-tu partie de l’une de mes vies antérieures?» En guise de réponse, il a profondément incliné la tête en signe affirmatif. À ce moment j’ai compris que je pourrais le recontacter au moment choisi et je me suis empressé de rejoindre mes compagnons de voyage qui s’éloignaient.

Je ne pouvais parler de cette rencontre, car à ma connaissance, à part ma compagne seule une autre femme de notre groupe avait établi le contact avec cette dimension de l’esprit, dont tant de gens préfèrent ignorer l’existence parce que cela rentre en conflit avec leur mental.. Ce n’est que plus tard, alors que je ne risquais pas d’être dérangé que fut rétablie la communication avec cet homme. Il m’a dit s’appeler Alcacios, être né dans la région de Thèbes de parents étrangers. Il se consacrait à la guérison des personnes venant à lui, principalement en leur faisant revivre des séquences de vies antérieures, ou de leur enfance, moments où leurs malaises avaient pris racine. Il a ajouté que ce serait bien de recontacter ces énergies que je portais toujours en moi. Je l’ai plus tard revu portant des cheveux blancs clairsemés. Il était assis à une grande table ovale et discutait avec les membres d’un conseil de Sages. Voilà comment nous pouvons recontacter certaines vies antérieures même hors d’un voyage initiatique, car nous sommes guidés dans nos choix.